Representational Painting, 1971
Betacam numérique PAL
4/3, noir et blanc, silencieux
Dans cette vidéo-performance, l'artiste, en sous-vêtements, est assise de trois quart face à la caméra. Elle fume et observe son visage dans un miroir situé hors-champs. Elle débute sa performance en coiffant ses cheveux. Tous ses gestes sont délicats, lents et précis comme s'ils faisaient partie d'un rituel sacré, universel. Chaque geste a son importance et participe à la transformation du visage. Ils sont ceux que réalisent toutes les femmes depuis des siècles dans des sociétés qui prônent la beauté ; le maquillage et la coiffure devenant les artifices permettant de créer l'illusion.
Eleanor Antin choisit de maquiller ses yeux en premier en appliquant la matière directement avec les doigts. Ses gestes sont parfois maladroits malgré l'application qu'elle y met. Elle se retrouve par exemple avec des tâches noires sur le nez. Sa préparation est entrecoupée de longs moments qu'elle consacre à s'observer, amusée par ces imperceptibles changements. La mise en scène amplifie l'effet d'observation avec des plans qui s'enchainent par l'intermédiaire de fondus enchainés cinématographiques.
Eleanor Antin explore l'acte de se maquiller comme mode traditionnel de l'expression de soi, en tant que femme, elle utilise le maquillage pour composer une image d'elle-même avec laquelle elle se confronte au monde. Se maquiller est une façon de se créer une nouvelle apparence, un autre soi plus confiant car conforme à la société.
Dans les années 1970 le mouvement féministe remet en question la notion du féminin et les signes extérieurs de féminité, tels que les cosmétiques, les tenues propres aux femmes et la coiffure. Cette posture devient une réflexion esthétique. Le maquillage, accessoire de beauté qu'utilise Eleanor Antin dans sa vidéo devient de la peinture qu'elle applique sur sa peau. Au delà des questions féministes, elle remet en cause le caractère conventionnel de la peinture et en fait un langage universel et quotidien.
Priscilia Marques